La langue qui nous habite...

La langue qui nous habite...
La langue qui nous habite...calligraphie encres de chine et gouache de Odile Pierron

lundi 24 décembre 2012

Atelier spécial "fin du monde" 21 décembre 2012

Exercice 1 : Vous disposez d'un don de voyance. Vous êtes invité à l’Élysée pour apporter au Président de la République votre vision sur le devenir de l'humanité :
« Monsieur le Président, je vois, je vois un carton d'invitation avec le planning suivant inscrit dessus :
- 6 heures 30 : Réveil du dernier jour annoncé par les radios
-7 heures : PETIT DEJEUNER
-8 heures : Pluie de météorites
-9 heures : destruction par une boule de feu du village de Bugarach
-10 heures : Premiers tsunamis
-11 heures : Arrivée des premiers extraterrestres
-11 heures 30 : Flashmob avec les extraterrestres sur le mode de Gangnam Style
-12 heures – 14 heures : PAUSE DEJEUNER – PIZZA
-14 heures 15 : Discours du Pape
-15 heures : Révélation des « humains élus »
-16 heures : Premières exécutions de terriens
-17 heures : Pluies acides
-18 heures : Réchauffement climatique subit
-19 heures – 21 heures : BARBECUE GEANT
-22 heures : Débarquement de milliers de vaisseaux extraterrestres
-23 heures 30 : CLOTURE DES FESTIVITES
FIN DU MONDE

Exercice 2 : Le Président vous demande d'établir une liste des actions les plus urgentes pour enterrer la civilisation dans la dignité, sauvegarder le patrimoine naturel et culturel dans une éventuelle transmission à des populations extraterrestres :
-Enterrer sous le plateau d'Albion, les œuvres des musées du Louvre et d'Orsay
-Émettre sur les ondes des messages de bienvenue aux extraterrestres
-Jour chômé le 21.12.2012 pour tous les employés
-Affichage dans les mairies du planning évoqué dans l'invitation « visualisée » par le médium
Eventuellement entrainement au Flashmob

Exercice 3 : Suite à vos révélations vous encourez les foudres de la population désorientée. Vous sortez de l’Élysée et vous vous rendez compte qu'un véhicule vous suit... racontez la suite :
« Sorti de l’Élysée par une porte dérobée, et descendant la rue du Faubourg Saint-Honoré, je prends conscience qu'un énorme 4X4 noir aux vitres fumées me suit lentement. En jetant un coup d’œil discret, j’aperçois la plaque d'immatriculation étrange « BEN XVI ».
J'accélère le pas et tourne dans la première rue à ma gauche. Je commence à courir. Deux hommes descendent du véhicule et se précipitent derrière moi. Forcément, ils me rattrapent. La voiture nous rejoint et je me retrouve poussé sans ménagement à l'arrière, la tête enfilée dans un sac de toile. Je n'ai même pas pu me débattre. Au bout de quelques minutes, le véhicule descend dans un parking souterrain. Je le reconnais au crissement des pneus. On me fait descendre et après quelques pas maladroits, je me retrouve dans un ascenseur. On m'introduit ensuite dans une pièce dont le sol est couvert de tapis. On m'enlève enfin le sac et je découvre devant moi un homme vêtu d'une soutane rouge, le nonce apostolique... »
Juan Carlos

lundi 10 décembre 2012

Atelier d'écriture du 7 décembre 2012

L'écriture m'a attrapé un jour avec une plume que je trempais dans un encrier coincé au bord de la table. A force de recopier des lignes et des lignes de a, b, et de c, ma main avait fini pas s'habituer à imiter des arabesques et leur donnait enfin un sens. La mémoire aidant, telle lettre devait être suivie par telle autres, puis par celle-là. le tout, ainsi accroché, devenait un mot. Celui-ci, une fois dit à voix basse, venait illustrer l'objet imaginé. Puis, quelques mois plus tard, directement, la forme irrégulière d'un mot écrit maladroitement entre deux lignes sur la feuille, prenait dans mon esprit la forme de l'objet. Enfin. Quelques mois plus tard encore, les premières phrases pourtant simples sont venus déclencher un sourire de satisfaction.
Joan Carlos


J'aimais écrire. Il y avait dans le geste du tracé une volupté qui allait au-delà de l'effort engagé pour atteindre la beauté. Et qui disait beauté disait régularité, continuité des ligatures et filiation spontanée entre les signes du début, frappés de ce fait pas la maladresse et les signes de la fin, frappés eux de fatigue. Ecueils qu'il fallait donc surmonter, langue tirée entre les dents, mûe par l'envie de plaire à ma maîtresse et l'orgueil aussi de réussir là où mes camarades échouaient par grossièreté. Car pour écrire, il fallait du raffinement et surtout avoir le pressentiment de l'art, lieu sacré de création, territoire des dieux. Or, mes camarades, sans doute par pragmatisme ne voyaient des lettres que leur utilité, leur aspect pratique en somme où faire une ligne de a, b, c, etc. ne pouvait se justifier que par l'usage dont elles tireraient bientôt profit, raisonnement finaliste de bon sens certes, mais sans égard pour la gratuité du geste. Moi, je me moquais éperdument du résultat ou du moins il n'était qu'une projection, alors que mon plaisir n'aurait souffert d'aucun ajournement. Tracer était un délice en soi, tremper la plume dans l'encrier de porcelaine blanche, célébration et appliquer le buvard rose proprement, profonde satisfaction, de celles que l'on éprouve lorsque le monde nous apparaît dans son ordre foncier, sa légitimité plénière. J'aimais écrire. Elève appliquée, mon travail soigné était récompensé par le sourire radieux de la maîtresse qui, telle une icône à mes yeux, était objet de vénération : elle savait lire, écrire et comble de liberté, elle portait un rouge à lèvres intense donnant à ses sourires encourageants un éclat supplémentaire. Depuis, j'affectionne les rouges à lèvres puissants.
Odile


 L'histoire commence quelque part au milieu des années 90 entre les murs d'un internat. l'un des gamins les plus turbulents décréta qu'il n'était pas acceptable que les énénements se déroulant entre ces murs tombent dans l'oubli. Il fut donc décidé que les moments les plus remarquables seraient consignés dans un cahier. Il serait tenu et gardé par un seul et unique rédacteur : moi... Pourquoi moi ? Pour tout le monde, ma nomination était une évidence. Elle l'était peut-être aussi pour moi. Arriva le jour où, les examens passés et l'été arrivant, la petite troupe fut disloquée par la force des choses, obligée à laisser la place au millésime suivant. L'envie d'écrire s'endormit quelque peu, victime d'une forme d'hibernation. Se nourrissant de folie, de désir et de fêtes, elle dut laisser la place au sérieux et à la rigueur d'une carrière à construire. Puis, un jour, une rencontre. La rencontre. Comme on n'en fait peut-être jamais dans une vie. Alors, quand on la fait une fois... une tornade, un tsunami, l'impression d'être pris dans une vague qui vous secoue, qui parvient presque à vous démembrer. Un ouragan émotionnel aussi bref que violent. Qui crée un trop-plein de sentiments dont il faut se libérer car on craint qu'il ne vous fasse imploser. De ce chaos, revient l'envie, disparaît aussi une sorte de pudeur, l'envie de ne plus se cacher, l'envie d'écrire.
François



La maîtresse versait une poudre bleu ciel dans une bouteille en verre, elle remplissait la bouteille d'eau et cela donnait une encre bleu profond qu'elle versait dans nos encriers en porcelaine blanche. Nous trempions nos plumes dans les encriers et nous nous appliquions à l'écriture. Nous écrivions de longues lignes de lettres. La première lettre que j'ai écrite était un N, la seconde un I, avec cela, je pouvais écrire NINI, petite fille rousse qui illustrait un livre d'école qui nous enseignait au b-a-ba de la lecture. Je trouvais Nini très jolie, pour ne pas dire que j'en étais amoureux. Nini m'a accompagné toute cette année scolaire du CP. A cette époque, il y avait le système des bons points, au bout de dix bons points, on avait droit à une image alors je m'appliquais.
Maurice


Que je me souvienne de ces premiers rendez-vous avec l'écriture est un exercice assez périlleux car les années ont passé. mais il reste ce fil qui me relie à mes tendres années?. C'est surtout l'année du cours préparatoire qui me reste en mémoire et l'institutrice qui était face à moi. Madame Coucou, c'était son nom, a su me donner envie d'avoir envie d'écrire. D'abord avec la craie blanche qu'elle faisait courir sur le tableau noir qui prenait toute la longueur du mur car il était de trois panneaux. Les traits, les arrondis, les accents, les cédilles étaient des petites pièces que je voulais à tout prix retenir sur mon cahier. A cette époque, le stylo-plume était notre compagnon. Je me souviens des taches malencontreusement déposées entre le petit encrier et la feuille blanche que j'épongeais souvent avec le buvard. Tenir la plume était une souffrance, une torture quand il fallait recopier ce que nous lisions sur le tableau. Au fur et à mesure que le temps passait, la maladresse et le mal laissèrent la place au plaisir. Les lettres commençaient à se dessiner sous mes yeux et je maîtrisais de plus en plus. J'en oubliais les crampes aux doigts les premières semaines. Après l'école, dans ma chambre, je revenais sur mon cahier pour réécrire les mêmes lettres en essayant de m'appliquer pour montrer mes progrès à mes parents. Je passais du temps car ce n'était pas si facile à 5 ans de tenir et de faire courir la plume. Elle bavait et salissait ce qui avait sur moi un effet bizarre. Je me levais et je laissais en plan ma feuille posée, abandonnée pendant un long moment avant de revenir avec la volonté de réussir à dessiner de jolies formes droites et arrondies sur le cahier de Madame Coucou.
Pascal



C'était laborieux, malgré toute ma volonté et ma motivation. j'étais une élève trantôt distraite, tantôt revêche, solitaire, étourdie. L'alphabet d'abord. Toutes ces lettres à retenir, dans l'ordre, avec plein de formes différentes. Puis les syllabes, puis les associations qui formaient des mots, puis le calvaire de l'orthographe, de la grammaire française dont la complexité n'a pas à ma connaissance d'équivalent sur terre. Ecrire ... Quelles souffrance ! Tout était parti de ma fascination pour ces formes étranges et esthétiques qui s'étalaient sur d'innombrables pages qui composaient les innombrables livres des étagères des maisons qui  m'ont vu grandir. Pas de télé à la maison. Pas de frère. Pas de soeur. Juste des livres et un grand jardin . La seule issue possible à cet ennui grandissant était l'apprentissage de l'écriture et de la lecture, de façon à pouvoir enfin recréer moi-même des variantes imaginaires de mes histoires favorites, Baba Yaga et les détectives. En classe, je reproduisais comme je pouvais, impatiente, colérique, ces formes bizarres qui me donneraient un jour accès à ce monde fabuleux du livre. Cet espoir me consolait temporairement des remarques forcément imméritées de la maîtresse , écrites sur le bulletin scolaire dans la rubrique "Ecriture" : Travail peu soigné, peut mieux faire mais ne s'en donne pas les moyens, élève brouillon... Quelle déception mais quel espoir !
Claire

mardi 4 décembre 2012

L'expression de la semaine : "Une nuit blanche"

Cette expression qui date du XVIIIème siècle signifie une nuit sans sommeil.
Le plus vieux document qui reprend cette expression est une lettre, datant du 30 octobre 1771, de la marquise du Deffand, Marie de Vichy-Chamrond, destinée à Horace Walpole, homme politique et écrivain anglais. La marquise y a écrit : « Vous saurez que j'ai passé une nuit blanche, mais si blanche, que depuis deux heures après minuit que je me suis couchée, jusqu'à trois heures après-midi que je vous écris, je n'ai pas exactement fermé la paupière; c'est la plus forte insomnie que j'ai jamais eue ».
La première signification de cette expression est un parallèle entre nuit blanche et nuit noire. Une nuit noire est une nuit où l’on dort d’un sommeil bien mérité et donc tout logiquement sans lumière allumée. Alors que lorsque l’on ne trouve pas le sommeil, la lumière nous accompagne pour rester éveiller. Une nuit blanche est donc un parallèle avec la couleur de la lumière.
Cette expression a une deuxième signification. Elle prend racine dans une coutume ancestrale de chevalier. La nuit, précédant leur consécration en tant que chevalier, les hommes se devaient de la passer éveillés vêtu d’une tenue entièrement blanche. Si cette signification s’avère correcte, il est surprenant de ne pas la trouver dans des écrits plus anciens.
Une autre signification de cette expression peut être proposée. A l’époque du règne d’Elisabeth, au XVIIème, la ville de Saint-Pétersbourg, en Russie, était fréquentée par de nombreux français principalement lors de la période estivale. Dans ce pays, en été, les nuits ne sont pas vraiment noires car le soleil ne se couche jamais. De plus, au cours de ces années, la vie nocturne au cœur de la ville battait son plein. Les participants aux fêtes passaient donc des nuits doublement blanches de par l’absence de sommeil et par la luminosité de la nuit. Il est tout à fait possible qu’un terme russe signifiant nuits blanches en français ait été ramené et diffusé en France par les touristes-fêtard.