La langue qui nous habite...

La langue qui nous habite...
La langue qui nous habite...calligraphie encres de chine et gouache de Odile Pierron

mardi 12 mars 2013

Atelier d'écriture du 11 mars 2013

On écrit toujours à partir d'un 2 novembre, jour des morts, car qui ne sait que l'on porte toujours son cadavre avec soi, tel un mort vivant qui s'ignore, dans l'immense cimetière de ce bas-monde. La mort y nourrit la vie en permanence, et la vie se nourrit de la mort : de la forêt qui tire sa substance de la litière des feuilles en décomposition, aux animaux et aux hommes qui ingurgitent de la matière vivante, toute vie y est autophage.
Oui, on écrit toujours à partir d'un 2 novembre, dans le cimetière de cet univers, marqué par l'interdépendance, où règne l'impermanence, dans l'insubstantielle vacuité d'un réel qui se dérobe sans cesse, laissant les êtres sensibles, faibles roseaux toujours tourmentés par tous les vents cinglants du destin, être accablés par l'inachevé et l'angoisse existentielle. On écrit toujours à partir de ce que l'on est et d'où l'on est : être mortel dans un monde mortel, aspirant à dépasser sa condition limitée, à se trouver en soi.
Louis


On écrit toujours  à partir d'un 20 août 1968. C'est une soirée comme les autres. Il fait très chaud. Les gens sortent. Il y en a d'autres, qui, montés à leurs villages, se sont couchés depuis longtemps. On les appelle les ignorants. Ignorants jusqu'au matin. Le bruit les fait sortir de chez eux. Un bruit méconnu qui deviendra pourtant bientôt familier. Trop familier. Trop constant. Le bruit des chars russes. Ils sont là pour nous imposer leurs lois par la force. Cette force nous limite dans nos gestes, dans nos pensées. Ces chars-là, ce jour-là, sont venus pour nous protéger, disaient leurs conducteurs. Mais nous protéger contre nous-mêmes. La protection a duré plus de vingt ans.
Léona

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